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Grassement payé pour perdre de l’argent, le P.D.G. d’ACE Aviation aura reçu 15 M$ en salaire pour 2009.

par Ciel Québécois

9 juin 2010

Il circule une blague dans le milieu de l’aviation.  « Si tu veux être millionnaire dans cette business, tu devras être milliardaire avant de commencer! »  Et bien ce ne sera pas le problème du président-directeur général d’ACE Aviation (société mère d’Air Canada), Robert Milton pour l’année 2009. Photo: J-P Bonin  En effet, celui-ci a reçu près de 15 millions $ en rémunération l’an passé. Bien que je n’aie pas l’intention de mettre en place une chronique économique, je tente de me mettre dans la peau des employés d’Air Canada.  Récemment, les pilotes de la société dénonçaient les pratiques de rémunérations du transporteur à l’égard de ses dirigeants. Un vote des actionnaires avait en effet accordé à Air Canada le droit d’augmenter substantiellement le nombre d’actions pouvant être émises pour récompenser ses dirigeants. Le nombre total d’actions qu’Air Canada pourra donc émettre dans le cadre de son régime d’intéressement à long terme est ainsi passé de 3,1 millions à 19,5 millions d’actions soit une augmentation de plus de 600%!

Évidemment, cela a suscité l’ire du syndicat des pilotes du transporteur. Il y a lieu de se questionner ici, et je pense que ce questionnement s’applique à tous les dirigeants de sociétés par actions.  Comment ce genre de décision peut-il être approuvé à 82 % par les actionnaires? Pourtant, ceux-ci ont vu leurs actions d’ACE baisser et baisser depuis plusieurs années maintenant.  Lorsqu’ils regardent leurs résultats et la fluctuation de leurs portefeuilles d’action d’ACE n’ont-ils pas des questionnements légitimes à propos de leurs investissements? Aussi, fondamentalement, comment peut-on récompenser grassement des dirigeants qui perdent de l’argent avec leurs opérations et qui souvent demandent l’aide des gouvernements.  Cela nous rappelle la situation des banquiers aux États-Unis, non?

En 2009, pour rajouter au comble du comble, ACE a mis fin aux contrats de travail de ses dirigeants et les a remplacés par des «ententes de services de consultation à coût variable». ACE a donc dû verser plusieurs millions en indemnités de départ à M. Milton, et aux autres membres de son équipe, en dépit du fait que ceux-ci ont conservé leurs emplois et leurs postes au sein de l’entreprise!

Pour son premier trimestre de 2010, Air Canada a dû essuyer une autre perte nette de 85 millions de dollars. Durant le même trimestre l’année dernière, l’entreprise avait essuyé une perte nette de 400 millions de dollars au premier trimestre de 2009. Au total, le transporteur aura perdu les faramineuses sommes de 24  millions en 2009 et plus de 1,03 milliard en 2008. Les revenus du transporteur se sont chiffrés quant à eux à 9,74 milliards, comparativement à 11,08 milliards un an plus tôt.

Depuis 2006, le transporteur aura donc perdu au total plus de 694 millions de dollars. Rappelons qu’au même moment, soit durant les exercices 2006, 2007, 2008, et 2009,  Monsieur Milton a empoché plus de 60 millions en salaire, bonus et actions.

Dernièrement, Calin Rovinescu, président et chef de la direction d’Air Canada, était quant à lui heureux des résultats de l’entreprise lors du premier trimestre de 2010 qui, rappelait-il, est d’ordinaire l’un des plus difficiles pour l’aviation commerciale. Malgré le fait que la compagnie qu’il dirige venait de perdre 85 millions de dollars, M. Rovinnescu ajoutait que les indices de relance économique étaient encourageants. Celui-ci prévoyait même une amélioration de la demande relative aux vols en classe affaires au cours des 12 prochains mois. Quel positivisme!  Nous nous demandons maintenant comment peuvent-il faire pour toujours faire accepter leurs mirobolants salaires et surtout comment font-ils pour toujours trouver des gens pour financer leurs pertes dans l’espoir qu’un jour il y aura des profits.

Ce sont les gens les plus optimistes de la planète.  Ils font des pertes, mais cela n’est pas grave, car les indices de relance économique sont encourageants…

Aujourd’hui dans cette chronique, et en tant que dirigeant d’une petite PME, je me permets de questionner (heureusement, il y a la liberté de presse) les récompenses octroyées à ceux qui dirigent en perdant de l’argent. Évidemment, on pourrait appliquer ce questionnement aux autres secteurs d’activités, pas juste aux transporteurs aériens. Air Canada vient d’être nommée meilleurs transporteurs aériens en Amérique du Nord. Cela est la preuve que les clients sont satisfaits du service du transporteur et que les employés font un excellent travail.  Heureux sont les dirigeants qui empocheront encore plus grâce à cette simple nouvelle.  Dans notre société, rares sont ceux qui osent discuter des vraies questions.  Comment peut-on justifier autant de largesse envers les dirigeants de certaines sociétés par actions (dans l’aviation comme ailleurs) alors que ceux-là même croulent sous les dettes et sous les pertes d’exploitation?  Est-ce que quelqu’un peut m’aider à y voir clair, je ne comprends vraiment pas cette logique corporative?